Il en est de nos races canines comme de notre lingerie : elles aussi subissent le couperet d’une mode implacable mais combien fugace ! Comme l’heure est à l’exotisme et au gigantisme, quoi de plus regrettable que le Schipperke, ce petit chien de berger, belge, entièrement noir, dépourvu d’extravagance et dont l’apparence générale est restée depuis des siècles dans la plus pure tradition lupoïde, n’attire plus les regards. . .
Et pourtant, les Belges devraient être fiers et s’enorgueillir de posséder encore une race nationale dont la devise est restée aussi belle et aussi véridique qu’elle l’était au moment de la fondation de son Club de race, en 1888 :
Belge, le Schipperke l’est indubitablement puisque l’origine même de son nom fait l’objet d’une querelle dont nous avons la spécialité. Ainsi, si certains prétendent que ce nom provient du temps où ce petit chien était très répandu sur les péniches, d’autres affirment qu’il faut y voir une déformation du mot « berger » en dialecte flamand.
LE PETIT BATELIER
A l’appui de la première hypothèse vient le fait que la présence d’un Schipperke à bord des péniches était effectivement très recherchée et cela, à plus d’un titre : non content d’être d’une compagnie agréable et peu encombrante pour ses maîtres, ce petit chien débarrassait impitoyablement le bateau de ses hôtes indésirables tels que rats et souris.Les taupes de nos jardins font encore de nos jours les frais de ses talents de ratier.
Sa couleur noire unie (noir zain) lui permettait de se fondre facilement dans la nuit et de surprendre d’autant plus vivement les voleurs éventuels. Ceux-ci étaient tellement saisis d’effroi qu’ils détalaient à toutes jambes, ne prenant pas le temps d’évaluer la taille exacte du chien qui avait donné l’alarme de sa voix furieuse et perçante.
Pour accréditer encore la thèse du chien de batelier, nous pouvons lire dans le journal « Chasse et Pêche » du 24 mai 1885, l’article suivant, écrit en 1882 : « On le rencontre beaucoup sur les bateaux des canaux et des rivières des Flandres il n’y salit pas le pont et n’y renverse pas les objets au moyen de sa queue, vu qu’il n’en a pas.
Bon chien d’écurie, il est grand ami des chevaux et excellent cavalier. Son bonheur, c’est de pouvoir monter le cheval de halage c’est alors qu’il se pavane, qu’il aboie aux passants il voudrait leur faire accroire que c’est lui seul qui fait marcher le bateau. ».
Le chien se serait donc bien identifié au maître, le propriétaire du bateau ou « schipper ».
LE PETIT BERGER
Les tenants de la version du « petit chien de berger » s’appuient, quant à eux, sur la ressemblance frappante qui existe entre le Schipperke et les autres Bergers Belges,le Groenendael en particulier.
Comme ce dernier, le Schipperke présente une belle fourrure noire, plus longue autour du cou, formant collerette, et à l’arrière des cuisses, formant culotte son corps s’inscrit dans un carré et le museau est comparable à celui du loup (d’où son appellation « lupoïde »).
Du chien de berger belge, le Schipperke en a aussi le tempérament : plein de fougue et d’énergie, il monte une garde vigilante devant les objets qui lui sont confiés, il ne lie pas connaissance avec les étrangers et il est très fidèle aux membres de sa famille auxquels il voue un attachement sans borne.
Les plus petits auraient été choisis pour en faire des ratiers dans les écuries et des gardiens dans les habitations. Ce seraient les ancêtres de nos Schipperkes. ». De là, par une dérive de divers dialectes flamands (« schaper » dans les Flandres, « scheper » dans la région d’Anvers, « schieper » dans les environs de Louvain-Diest), le nom de « Schipperke » s’est-il vu lié à la fonction de chien de berger.
Cette seconde hypothèse ne satisfait cependant pas les puristes puisque, en flamand, les chiens de berger sont désignés sous le terme générique de « herder » et que, en fait de berger, notre Schipperke n’a jamais rassemblé que des . . . oies !
Mais chacun s’accorde sur la signification du diminutif flamand « ke » qui nous rappelle la petite taille de ce chien (30 centimètres en moyenne au garrot) à l’origine si ancienne (on en parle déjà en 1600) et si controversée.
LE SPORTIF
D’un poids variant entre 3 kilos pour les sujets les plus petits (assez rares de nos jours) et 9 kilos pour les sujets les plus grands (5 kilos représentant la moyenne idéale), le Schipperke est néanmoins bâti comme un vrai sportif dont il a l’énergie, la souplesse, la force et l’endurance. Il excelle dans les programmes d’obéissance et d’agility (sorte de jumping pour chiens) et il termine avec brio les épreuves d’endurance habituellement réservées aux plus grandes races.
Son flair et son intelligence peuvent également être utilisés pour retrouver des victimes lors de séismes ou d’effondrement d’immeubles. Sa petite taille lui permet de se faufiler là où de plus grands chiens ne peuvent parvenir.
C’est également un très bon nageur mais toutes les lignées ne sont pas aussi fanatiques de l’eau. Certaines origines donnent des chiens qui adorent se mouiller, d’autres, des individus qui supportent sans problème le climat pluvieux de notre pays mais qui ne se jetteront pas spontanément dans la moindre flaque qu’ils croiseront sur leur route. Le comportement de la mère est sans doute capital dans l’attitude que ses chiots développeront par la suite face à l’élément liquide. Il s’agit également d’un apprentissage d’autant plus aisé qu’il sera précoce.
L’AGREABLE COMPAGNON
Avec son physique léger mais solide, le Schipperke est donc le compagnon idéal, tant à la ville qu’à la campagne. On peut l’emmener partout avec soi puisqu’il obéit bien et qu’il prend peu de place dans la voiture il sait se faire discret dans les transports en commun et se faire oublier
dans les magasins ou dans les restaurants.
Ce petit chien s’adaptant ainsi particulièrement bien aux changements de milieu, Ch. Huge disait encore de lui :
« Le Schipperke est le meilleur chien de maison ».
Loin de lui l’idée qu’il fallait le conserver enfermé dans la maison à longueur de journée !
Car, dès qu’il en a l’occasion, le Schipperke préfère s’ébattre dehors, quelles que soient les conditions météorologiques. Bien protégé par une fourrure abondante, sèche au toucher et très dense, il est remarquablement bien adapté à nos conditions climatiques souvent rudes.
Il est bon de rappeler ici que, pour lui conserver sa protection naturelle contre la pluie et le froid, le poil du Schipperke craint l’eau savonneuse. D’un entretien facile, la fourrure de ce petit chien ne nécessite qu’un brossage hebdomadaire, un peu plus fréquent en période de mue où les poils morts prennent une teinte brun-rouge. Le brossage à rebrousse-poil avec une brosse en chiendent débarrasse le poil mort et aide ainsi à la repousse d’un nouveau petit manteau noir zain.
En ce qui concerne l’appétit du Schipperke, il est . . . énorme !!! Mais n’accédez jamais à ses demandes suppliantes : 200 gr de nourriture sèche complète pour un chien de 5 kilos sont bien suffisants ! Il n’y a rien de plus laid que de voir un Schipperke réduit à l’état de « tabouret ambulant » par le gavage d’une maîtresse bien intentionnée.
Facile d’entretien, tenant peu de place, agréable à vivre, d’un coût journalier minime, le Schipperke a de tous temps été le compagnon de personnes peu fortunées et, le plus souvent, âgées. Peut-être cela s’explique-t-il par le fait que l’achat de cette race repose sur un choix mûrement réfléchi et non sur un coup de tête que de jeunes gens impatients présentent parfois. En effet, rien d’extravagant n’attire le regard sur un Schipperke. Il faut vraiment s’être intéressé de près à la race pour en connaître les grandes qualités.
Parmi ces dernières, citons encore son extraordinaire longévité ! Il n’est pas rare de rencontrer de vieux beaux de 14-15 ans qui font toujours une cour assidue aux belles de passage sur leur territoire !
Il faut encore mentionner ici la véritable passion qu’il porte à l’égard des tout jeunes enfants dont il aime partager les jeux, parfois brutaux et maladroits. A cette occasion, il fait preuve d’une douceur et d’une patience incroyables, qui contrastent avec la fougue et la vivacité dont il fait montre habituellement. Chien de compagnie, le Schipperke l’est donc assurément !
LE DIABLOTIN DE GARDE
Tout en étant un délicieux petit chien de compagnie, le Schipperke constitue également une sonnette d’alarme particulièrement efficace : on ne trompe pas la vigilance d’un Schipperke !
Si de mauvaises langues le qualifient parfois de « petit roquet aboyeur », c’est à tort : il vaut toujours mieux aller vérifier pourquoi ce petit chien donne l’alerte.
Malgré sa taille réduite qui le rend peu dissuasif aux yeux d’un malfaiteur éventuel, le Schipperke est un défenseur de vos biens particulièrement brave: en cas de nécessité, il peut se jeter sur l’ennemi avec une hardiesse peu commune et se servir avec talent de ses dents pointues pour chasser l’importun.
Il est même capable de sacrifier sa vie pour porter secours à son maître, car un véritable Schipperke n’a peur de rien !
Le Schipperke cache dans sa petite fourrure un grand caractère !
LE CLUB DE RACE
C’est en mars 1888 qu’un groupe d’amateurs se réunit pour protéger notre petite race nationale de l’exportation massive de ses meilleurs sujets vers l’Angleterre. Ils constituent alors le premier Club de race reconnu officiellement par la Société Royale Saint-Hubert et définissent le standard du Schipperke.
Vous pouvez consulter ce standard, revu le 23 mars 2003 , sur le site du Royal Schipperkes Club : http://www.schipperke.be
Aujourd’hui, le Club du Schipperke a toujours pour objectif principal de défendre et de populariser encore davantage cette petite race belge aux qualités si injustement méconnues des non initiés.